Un contraste entre un réseau structurant récent et un maillage secondaire dense davantage en lien avec le paysage
Les routes du Morbihan se caractérisent par un fort contraste entre un réseau de routes à 2X2 voies, issues du plan routier breton, sans lien réel avec le paysage et aux effets induits sur l’urbanisation importants, et une trame secondaire, dense, héritée de l’histoire des modes d’occupation des sols, dont les potentialités en termes de découverte des paysages et de promenade sont à valoriser.
Composantes du territoire, elles sont facteurs de formes particulières de développement urbain. Mais elles offrent aussi des moyens privilégiés de découverte des paysages.
L’actuelle trame routière morbihannaise est, dans sa majeure partie, le résultat des grands aménagements entrepris à partir des années 1970 dans le cadre du « plan routier breton ». Il s’agissait de désenclaver une région isolée des grands axes de communication, de « passer de l’ère du chemin creux à celle de l’autoroute » [1], dans le cadre d’un vaste projet de développement économique mené par l’État.
La mise en œuvre du plan routier breton, qui s’échelonne du début des années 1970 jusqu’en 2009, permet aujourd’hui de relier les principales agglomérations bretonnes entre elles et les départements limitrophes (axes Nantes-Lorient, Rennes-Lorient, Rennes-Vannes). Ce réseau de 2X2 voies, entièrement gratuit, contribue désormais à la structure du territoire régional. Il participe aussi à son morcellement, encourage l’urbanisation linéaire et la consommation d’espace par la multiplication des échangeurs. Enfin, les tracés (plus de vitesse et de sécurité), ont entrainé un large recours aux arasements et comblements des reliefs naturels, multipliant les sections en tranchée ou en remblai. Ce type d’infrastructure a nécessité des mouvements de terrain importants, impactant dans le paysage.
Un réseau côtier plus dense
L’étude de l’évolution du réseau routier montre une différence moins marquée qu’aujourd’hui entre les dessertes de la côte (concentration sur le linéaire côtier et plus grande densité) et l’intérieur des terres. Ainsi, le réseau des voies romaines était tout aussi dense le long du littoral qu’à l’intérieur des terres. La carte de Cassini confirme cette situation encore au XVIIIe siècle. Ces voies étaient empierrées, proches du terrain naturel, très souvent plantées d’alignements d’arbres ponctuant le paysage.
En entrée de villes, un écran de zones artisanales et industrielles
La mise en 2x2 voies d’anciens tracés existants est une conception de réseau viaire majeure, spécifique à la Bretagne. La gratuité des 2x2 voies de Bretagne a permis de multiplier les accès et, par conséquent, les installations commerciales et artisanales toujours à la recherche d’accessibilité et d’effet vitrine. Ces implantations répétées le long des routes principales banalisent le paysage, créent un écran visuel et se substituent aux horizons agro-naturels.
Le long de ces axes, en entrée d’agglomérations, des écrans anti-bruits des secteurs de logements, viennent s’ajouter à la barrière formée par les bâtiments d’activité et de commerce. La transformation d’anciens tracés en 2x2 voies, a exposé les secteurs d’habitation existant aux nuisances sonores. L’automobiliste a le sentiment de traverser une zone suburbaine indifférenciée, sans caractère urbain ni rural, peu qualitative, et en complète opposition avec les images touristiques souvent mises en avant sur les panneaux d’accueil.
Le phénomène ne se limite pas aux grandes villes desservies par le réseau des routes à 2x2 voies. L’approche de nombreuses localités est en effet marquée par des espaces très étirés, sans ordre apparent, mêlant logements, activités et commerces, et sans traitement qualifiant de l’espace public.
Muzillac, un exemple d’extension urbaine induite par la RN 165
A l’approche de Muzillac, la RN 165 est perçue comme une gaine enfermant l’automobiliste. L’implantation de ces zones d’activités, leurs enchaînements successifs sont des destructions du paysage. Redonner une légitimité à ces zones sera un exercice nécessaire mais peu aisé. La mise en place par la Région Bretagne de la démarche "Bretagne Qualiparc" en 1999, tend à atténuer ces effets indésirables. Cette démarche prône les quelques principes d’aménagements urbains suivants : une organisation compacte avec moins de façades, de linéaire de « vitrine »,
la constitution d’une épaisseur paysagère marquant un retrait entre la voie et la zone d’activités,
une recherche de qualité architecturale pour les bâtiments.
Il s’agit d’une démarche partenariale destinée également à générer une gestion économe du foncier.
Le maillage dense offert par le réseau routier « mineur » du Morbihan répond à la dispersion des implantations humaines des campagnes. Il permet de relier les innombrables bourgs, hameaux et fermes dispersés sur le territoire départemental.
Les chemins creux, motifs de paysage
Autrefois, dans les pays de bocage, les chemins, souvent creux, reliaient entre eux des zones d’habitat disséminées. Les remembrements ont fait disparaître une partie de ce réseau. Véritables motifs et composantes de l’identité paysagère du Morbihan, le devenir des chemins qui ont subsisté doit être pris en compte dans les projets de territoire des communes (PLU/PADD)
Les routes du bord de mer
La forte découpe du littoral sur certaines sections (exemple du golfe du Morbihan) et la composition de la côte en isthmes, génèrent des effets de cul-de-sac sur les zones particulièrement attractives. La presqu’île de Quiberon, avec son unique accès, ou encore la presqu’île du Rhuys en sont des exemples.
L’utilisation du réseau routier à proximité du bord de mer est ainsi source de conflits d’usages et de pratiques. Mais la pression touristique peut aussi à l’occasion, faire naître des "voies vertes" à partir d’anciens tracés.
Les mutations d’usage des voies
On observe deux phénomènes liés au développement du tourisme vert : la création de voies vertes
la reconversion d’anciennes lignes (voies de chemin de fer...)
L’engouement pour le « tourisme vert » et la promenade, a permis de remettre en valeur d’anciens tracés de voies ferrées ou chemins de halage pour constituer de nouveaux réseau « verts ». Ces réseaux (voies vertes sur anciennes voies de chemin de fer ou sur chemins de halage, par exemple) peuvent également bénéficier de la présence d’un beau patrimoine d’ouvrages d’art.
A l’intérieur des terres, ces aménagements connaissent un réel développement, notamment avec la création de pistes cyclables sur d’anciens tracés ferroviaires.
On peut citer un exemple de mutation d’usage d’infrastructure, véritable réussite : la mise en route en période estivale du fameux « tire-bouchon ». Ce petit train permet de relier la gare d’Auray à Quiberon avec de nombreux arrêts sur les spots de plages.
Ainsi, des ouvrages tels que l’ancien pont du Bono, ont vu leurs statut, fonction, usage et perception du paysage totalement bouleversés. Ne supportant plus l’intensité du trafic routier, le vieux pont en bois fut doublé par un nouveau pont empruntant un nouveau tracé routier qui contourne le centre bourg. L’ancien pont, restauré et destiné aux piétons est utilisé pour les fêtes de la commune, et s’inscrit sur un circuit pédestre.
Des ponts, objets et points de vue sur les paysages
Sur la rivière d’Auray
Le pont de Kerplouz est un ouvrage à béquille avec caisson de hauteur variable, et une portée d’environ 108 m, pour un total de 294 m. Il a la particularité technique de comporter un tablier unique. Cet ouvrage est un acte d’écriture architecturale soignée dans le paysage. La mise en place de cet ouvrage a répondu à plusieurs enjeux liés au site : la co-visibilité avec le site classé de Saint-Goustan / Port d’Auray, une dissymétrie de niveaux entre les deux rives, la réserve d’espace pour le passage de navires interdisant l’installation d’appuis sur la rivière. Le projet réalisé s’impose comme un élément construit, motif de paysage. De plus, un soin a été apporté sur le traitement des rambardes qui laissent le regard des passagers se projeter sur la vallée et sa rivière.
Sur la Vilaine
Deux ponts, véritables monuments, enjambent la Vilaine à la Roche-Bernard.
Sur le Scorff
Du côté de Lorient, deux ponts relient les rives du Scorff et du Blavet
Sur le Bono
Les retenues d’eau Le barrage de Guerlédan, est situé sur les communes de St Aignan (Morbihan) et Bain de Bretagne (Côte d’Armor)
Les petits ouvrages d’art, un patrimoine précieux et discret Les ponts anciens, ouvrages d’art et patrimoine des routes secondaires du Morbihan
Pour trouver ce petit patrimoine il faut aller à sa rencontre, en remontant les vallées du Morbihan. Souvent en pierre du pays, il s’agit de franchissements routiers ou piétons. Ils ponctuent les itinéraires de randonnées.
[1] (Rapport de Jacques Ferret - 1er Chap. : pour une politique globale d’aménagement du réseau routier primaire. 1969, création des régions).